• Définition du lombricompostage :

Méthode d’utilisation des vers afin de transformer des matières organiques (ici le fumier) en une matière appelée lombricompost, très semblable à l’humus ou au terreau (Munroe, 2016). La durée d’un cycle de lombricompostage est comprise entre 3 et 9 mois.

 

  • Les vers utilisés :

  • Espèces :
  •  Eisenia fetida communément appelé « vers de fumier » ou « vers tigré » qui préfère la matière en décomposition.
  • Eisenia andrei communément appelé « vers rouge » qui préfère la matière fraîche. 

 

  • Type de vers : « Épigé » c’est-à-dire qu’ils vivent dans des litières à la surface du sol et qu’ils se nourrissent de matière organique en décomposition. Ils forent très peu le sol et n’ont pas de trous permanents (Munroe, 2016).

 

  • Caractéristiques :
  • Résistants à une large gamme de température qui se situe aux alentours de 0-35°C. Il faut tout de même savoir qu’ils sont particulièrement efficaces entre 15 et 25 °C et que leur température optimale est 20 °C (Ferme lombricole du Moutta, 2024).
  • Les vers Eisenia andrei sont connus pour résister au gel mais de manière générale, pour les deux espèces, les températures en dessous de 0°C et au-dessus de 40° leur sont fatales (Munroe, 2016).
  • Capacité de reproduction rapide.
  • Peuvent manger l'équivalent de leur poids par jour en matière organique.
  • Leur respiration se fait par la peau à l'aide d'un mucus qui recouvre leur corps. Cette protection disparaissant dans un environnement sec, les vers recherchent les endroits humides, sans excès d’eau car ils peuvent se noyer. Ils fuient également la lumière (Ferme lombricole du Moutta, 2024).

 

  • Aperçu des vers :

                                                                            

 Figure 1 : Eisenia fetida, SOURCE : Lombricomposteurfacile                                     Figure 2 : Eisenia andrei, SOURCE :  Alchetron

 

  • Avantages du lombricompostage :

  • Augmente la disponibilité de la plupart des éléments nutritifs pour les végétaux (azote, magnésium, phosphore…) comparé au compostage classique
  • Stimule la croissance des plantes de par une activité microbiologique plus importante qu’un compostage classique et grâce à la digestion des vers
  • Destruction des organismes pathogènes
  • L’aération de la matière à décomposer se fait par les vers donc pas besoin de la retourner
  • Augmentation de la biodiversité du sol grâce aux vers (Munroe, 2016)
  • Possibilité de faire de la lombriculture et vendre les vers

 

  • Inconvénients du lombricompostage :

  • Nécessite des connaissances
  • Nécessite de l’espace
  • Demande de la main d’œuvre
  • Les vers sont sensibles aux aléas climatiques
  • Risque de perdre les vers pour raisons climatiques ou mauvaise gestion des andains

 

  • Besoins des vers :

  • Un milieu favorable appelé litière :

 

  • La litière doit pouvoir absorber et conserver l’eau suffisamment pour que les vers prospèrent. La litière doit avoir un bon pouvoir de gonflement car un matériau de trop grande densité initiale, ou qui se tasse trop, réduira ou bloquera la circulation de l’air or les vers ont besoins d’oxygène pour vivre. Même si les vers consomment leur litière au fur et à mesure qu’elle se dégrade, il est essentiel que ce processus soit lent. Des teneurs élevées en protéines ou azote entraînent une dégradation rapide et un dégagement de chaleur qui crée un habitat et des conditions inhospitalières, sinon fatales. Un dégagement de chaleur dans les couches de nourriture du système de lombriculture ou de lombricompostage est sans danger, mais pas dans la litière. Ainsi, la litière devra avoir une faible teneur en protéines et/ou en azote (rapport carbone/azote élevé).
  • Le fumier de cheval a un pouvoir absorbant allant de moyen à bon, son potentiel de gonflement est bon et son rapport C/N se situe entre 22 et 56. De plus il est gratuit et renouvelable donc c’est la litière idéale. La paille constitue aussi une bonne litière avec un rapport C/N allant de 48 à 90, un potentiel de gonflement moyen bon et un pouvoir absorbant faible. Pour augmenter ce dernier on peut la mélanger avec du fumier composté ou vieilli (Munroe, 2016).

 

  • La nourriture :
  • Dans des conditions parfaites, les vers peuvent consommer quotidiennement plus que leur propre poids ; on s’entend cependant sur une consommation moyenne équivalant à la moitié de leur poids.
  • Les fumiers sont la matière alimentaire la plus fréquemment utilisée avec les vers. Il est également possible de leur donner nos déchets alimentaires. Il faudra cependant veiller à ne pas y introduire de la viande ni des éléments riches en matières grasses pour éviter les désagréments olfactifs, la venue des organismes nuisibles et la diminution de l’oxygène. Il est tout à fait possible de donner aux vers des mélanges de fumier (par ex bovin-équin) à composter ou des mélanges de déchets (fumiers-déchets alimentaires) (Munroe, 2016).

 

  • Humidité :
  • Les vers respirent par la peau, un taux d’humidité inférieur à 50 % dans la litière est dangereux. Hormis la chaleur ou le froid extrême, rien ne tuera plus rapidement les vers que le manque d’humidité. La plage d’humidité idéale pour le lombricompostage ou la lombriculture, est de 70-90 % (Munroe, 2016).

 

  • Aération :
  • Les vers respirent et ne peuvent survivre à des conditions anaérobies (absence d’oxygène). Par conséquent, il est important de veiller à ce qu’on leur donne en guise de nourriture mais aussi de leur fournir une litière assez poreuse pour qu’il puisse s’y déplacer et ainsi créer des aérations. Ainsi, il n’est pas nécessaire de retourner le matériau, ce sont les vers qui se chargent de l’aérer (Munroe, 2016).

 

  • Température :
  • Pas de reproduction de vers en dessous de 10°C, très peu de consommation de nourriture. Pour un lombricompostage efficace il faudra prévoir une température au-dessus de 15°C. Pour la lombriculture il faudra privilégier les 20°C. Au-dessus de 35 °C les vers meurent. En-dessous de 0°C, certains peuvent résister au gel mais à partir du moment où ils ne sont plus en capacité de se nourrir, ils meurent aussi. Cependant leurs cocons survivent à de longues périodes de gel profond et restent viables (Munroe, 2016).

 

  • pH :
  • Les vers peuvent survivre dans une plage de pH allant de 5 à 9.
  • La plage de 7,5 à 8 semble être la meilleure pour les vers.
  • Le pH des litières de vers a tendance à baisser avec le temps. Ainsi, il faut faire attention au type de nourriture que l’on apporte aux vers : Si la nourriture est plutôt alcaline, cela a un effet régulateur qui tend vers un pH neutre ou légèrement alcalin. En revanche, une source de nourriture ou une litière acide (marc de café, mousse de tourbe) peut faire baisser le pH des lits bien en dessous de 7. Cela peut causer un problème de développement de parasites comme les acariens.
  • Possibilité de faire remonter le pH par l’ajout de carbonate de calcium et de le faire baisser en introduisant une litière acide comme la mousse de tourbe (Munroe, 2016).

 

  • Teneur en urine et autres composants toxiques :
  • Si le fumier est ramassé dans des locaux bétonnés, il devra être lessivé avant d’être lombricomposté car l’excès d’urine risque de causer une accumulation de gaz dangereux dans la litière, comme le méthane (Gaddie et Douglas 1975).
  • Attention aux vermifuges : La plupart se dégradent assez rapidement et ne constituent pas un problème pour l’élevage de vers. Mais l’application de fumier frais provenant d’animaux récemment traités pourrait avoir des conséquences fatales pour une partie des vers (Munroe, 2016).

 

  • Mise en œuvre :

  • Critères réglementaires pour choisir l’emplacement du lombricompostage :
  • Terrain plat : pente < 7%
  • Ne pas être en zone humide ou inondable
  • Respecter une distance de 35 m des puits, forages, rivières, cours d’eau, berges
  • Respecter une distance de 5 m des fossés de route et voirie
  • Respecter une distance de 50 m des tiers
  • Respecter une distance de 200m des zones de baignades et zones aquacoles
  • Respecter les prescriptions de l’arrêté préfectoral définissant les périmètres de protection du captage (Voir le Règlement Sanitaire Départemental)

 

  • Critères réglementaires pour le lombricompostage :
  • Le dépôt de fumier ne doit pas faire plus de 2m de haut ni représenter plus de 2 000 m3 : maximum 3 tonnes de fumier par jour
  • Le compostage au champ est autorisé après stockage préalable du fumier pendant 2 mois sous les animaux ou dans une fumière
  • Les emplacements de fumier au champ doivent être changés tous les ans avec une durée maximum de dépôt de 10 mois si vous êtes en zones vulnérables nitrates
  • Retour sur le même emplacement au bout de 3 ans si vous êtes en zones vulnérables nitrates
  • Possibilité de rendre l’emplacement fixe en faisant un dallage drainant et stockant les jus
  • En cas de dépôt supérieur à 50 m3 une déclaration à la mairie doit être effectuée
  • Tenue d’un cahier de lombricompostage indiquant la nature du produit composté, les dates de début et fin de lombricompostages, l’aspect du produit final (couleur, odeur, texture) et le relevé hebdomadaire des températures (France Galop et al., 2024)
  • A partir d’une quantité supérieure ou égale à 3 tonnes de fumier traité par jour, l’unité de compostage doit s’inscrire dans le cadre réglementaire des ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement) (AIDA, 2024)
  • Proposition d’une installation d’un système en andain continu :
  • Principe : Les andains sont de simples tas de litière et de nourriture mélangées ou de litière avec la nourriture étalée par-dessus, dans lesquels on introduit les vers et que l’on ne touche plus jusqu’à l’achèvement du processus (France Galop et al., 2024).
  • Représentation visuelle :

 

Figure 3 : Schéma de mise en place du système d’andain, SOURCE : Production personnelle

 

 

     

Figure 4 : Schéma du dédoublement de l’andain initial, SOURCE : Production personnelle

 

 

  • Technique : On dispose au sol le mélange vers + litière acheté chez un valorisateur. On l’étale de façon à ce que notre andain fasse 5 m de long sur 2 m de large. L’épaisseur litière + vers représentera une couche d’environ 20 cm de hauteur. Ensuite, on ajoute 40 cm de fumier déjà composté (ancien fumier bien foncé) afin d’éviter la montée en chaleur du processus de compostage, et on arrose l’andain. Une fois que ce volume a diminué, on ajoute à nouveau 40 cm de fumier (peu importe le stade de maturation). On répète ces ajouts jusqu’à atteindre la hauteur maximale que l’on souhaite pour notre andain (< 2 mètres). Au bout de 3-4 mois, on dédouble l’andain, c’est-à-dire que les 20 premiers centimètres de ce dernier, contenant les vers, sont récupérés et utiliser pour faire un autre andain de la même façon qu’expliquer précédemment. Il s’agit pendant 2 ans de se concentrer sur la multiplication des vers. Les andains sont bâchés avec une bâche perméable laissant passer l’air et permettant ainsi de conserver l’humidité. Lors du séchage, les andains peuvent être également bâché avec une bâche non perméable et noire pour attirer la chaleur. Concernant l’aération, retourner une fois l’andain durant le cycle, par exemple au début du mois d’avril permet d’activer la dégradation. (Discussion avec Thomas Fiaschi un lombriculteur, 2024)

 

  • Contrôle des paramètres nécessaires au bon fonctionnement du système :
  • Utiliser un thermomètre numérique pour mesurer la température
  • La bonne humidité pour un compost peut se mesurer simplement en prenant une poignée : si en serrant cette poignée, du liquide s’en échappe, c’est qu’il est trop humide et si en revanche la poignée est friable, très sèche avec peu de matière noire, c’est qu’il est trop sec (Permaculture Design, 2021). Dans le cas où l’andain est trop sec il y a possibilité d’installer un arrosage goutte-à-goutte la nuit avec un débit de 12 litres/ heure. Sinon, l’arroser au tuyau peut suffire. Les andains consomment très peu d’eau. En termes d’estimation ce serait 10 m3 d’eau utilisée sur une année pour un andain de 1000 m². (Discussion avec Thomas Fiaschi un lombriculteur, 2024)
  • Le pH du compost peut être mesuré avec un kit d’analyse de sol en suivant les instructions du fabricant ou, si votre compost est humide mais pas boueux, vous pouvez simplement utiliser une bande indicatrice de pH. Vous pouvez également utiliser un analyseur de sol électronique pour lire la plage de pH du compost (Felicien, 2023)
  • De manière générale, apprécier la santé d’un andain peut se faire simplement par l’observation de la quantité de vers qu’il contient, ainsi que de la présence de vers qui se reproduisent et de la présence de cocons. (Discussion avec Thomas Fiaschi un lombriculteur, 2024)

 

  • Quand faire l’installation :
  • Le compostage au champ peut se débuter toute l’année, mais il est généralement réalisé au printemps, pour un épandage à l’automne, sur les terres agricoles (pâtures, vignes arboricultures, maraichages…).

 

  • Utilisation du lombricompost et des vers :

  • Épandage au champ si hors zone vulnérable nitrates :
  • Obligation de stocker pendant minimum 2 mois le fumier au préalable sur fumière ou sous les animaux
  • Interdiction d’épandre à moins de 35m d'un puits, d'un forage, d'une source d'eau, d'un aqueduc, en écoulement libre, d'un rivage, d'une berge, d'une installation sous-terraine d'eau potable, d'un lieu de stockage de l'eau ; et à moins de 50m d'une habitation non liée à l'exploitation agricole, habitée par des tiers, de zones de loisirs et de tout établissement recevant du public. Ces distances peuvent varier en fonction des départements. Il est donc nécessaire de se référer au Règlement Sanitaire Départemental (RDS).
  • Si l'épandage est effectué sur des terres labourables à moins de 100m des habitations, alors il devra être immédiatement suivi d'un labour (enfoui au plus tard le lendemain). Sur prairie, comme il n'y a pas d'enfouissement, la distance minimale d'épandage est aussi de 100m par rapport aux tiers
  • L'épandage de fumier/compost peut être réalisé toute l'année, même sur des sols pris par le gel. Il sera cependant interdit lorsque le sol est enneigé, détrempé par de fortes pluies ou inondé (Doligez Pauline IFCE, 2019)
  • Préférer des apports avant plantation (cultures annuelles et pérennes) au plus près de la mise en culture et en début de cycle végétatif pour les cultures pérennes (Chambre d’agriculture-Pyrénées Orientales, 2011)
  • Compter environ 10 à 30 tonnes de compost à l’hectare
  • Pour une assimilation rapide dans le sol, il est préférable d’épandre à l’automne 
  • Interdiction d’épandre sur sol en pente > 10%
  • Interdiction d’épandre à moins de 100m du captage en eau potable

 

  • Épandage au champ si zone vulnérable nitrates :

Aux restrictions citées préalablement s’ajoute :

  • Obligation d’un plan de fumure et parcellaire
  • Obligation de tenir un cahier d’épandage et un calendrier
  • Interdiction d’épandre sur sol non cultivé
  • Des restrictions du 15/11 au 15/01 sont établies pour l'épandage sur des cultures implantées à l'automne
  • Il n'existe aucune restriction d'épandage sur prairies, sauf si elles sont implantées depuis moins de 6 mois (Doligez Pauline IFCE, 2019)

 

  • Vente de lombricompost :
  • Possibilité de vendre le lombricompost en sac, vrac ou big bag.
  • Compter une dizaine d’euro pour un sac de 20 kilos, entre 165 et 230 euros pour un big bag de 500 kg (1000L), aux alentours de 200 euros la tonne en vrac (Ferme Lombricole de Provence, 2024), (Ferme lombricole Mister Green, 2024).
  • Le produit doit être normé, c’est-à-dire qu’une analyse pour le lot est nécessaire. Il faudra compter environ 80 euros (Discussion avec Thomas Fiaschi un lombriculteur, 2024).

 

 

  • Vente de vers :
  • Possibilité de vendre les vers. Il faudra alors penser à offrir aux vers les conditions optimales à leur reproduction et ainsi intégrer de vrais objectifs liés à la lombriculture. Il faudra également réfléchir à la récolte des vers dans les andains, qui se faire à la main.
  • Compter une cinquantaine d’euros le kilogramme (Ferme Lombricole de Provence, 2024), (Ferme lombricole Mister Green, 2024).

 

  • Matériel :

 

        • Andains :
  • Un tracteur équipé d’une fourche ou d’un chargeur pour vider la fumière et transvaser le fumier
  • Une remorque tractée basculante, qui permettra aisément de placer au champ, le fumier en andains 
  • Bâche perméable
  • Bâche non perméable

 

        • Épandage :
  • Un épandeur à hérissons verticaux est adapté. Pour des tonnages inférieurs à 10 t/ha, privilégier un épandeur avec table d’épandage (Chambre d’agriculture-Pyrénées Orientales, 2011).

 

        • Vente de vers et de lombricompost :
  • Big bag
  • Sac de 20 kg
  • Palettes
  • Godet pour le vrac

 

  • Investissement en dehors du matériel agricole et des éléments de conditionnement pour la vente :

  • Achat du big bag contenant vers + litière pour débuter l’activité : 2 500 euros (Discussion avec Thomas Fiaschi un lombriculteur, 2024)
  • Bâches : 4.28 euros /m² (Aquatiss, 2024)

 

 

 

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

 

Bibliographie :